Depuis des années, les autorités financières européennes réfléchissent à un cadre de régulation pour les cryptomonnaies. Cette régulation, comme toute loi européenne a nécessité son lot d’étapes avant une validation définitive.
C’est désormais chose faite, puisque la loi MiCA a été validé le jeudi 20 avril 2023 en même temps que la loi TRF à 529 voix pour et 29 contre. Source: https://www.europarl.europa.eu
La loi européenne MiCA (Markets in Crypto-Assets)
Cette loi est un texte imbuvable de 380 pages.
Sur un plan éthique et légal, la loi MiCA a pour rôle d’encadrer le secteur des cryptomonnaies pour le protéger contre le blanchiment d’argent et le terrorisme mais aussi contre les fraudes et les démarches marketing abusives. Les utilisateurs et investisseurs seront mieux informés sur les risques qu’ils encourent dans ce milieu. Point très important, la loi MiCA interdit la manipulation de marché, ce qui est un des points les plus positifs lorsque l’on connait les manipulations massives qui se déroulent lors des bull run.
Sur un plan technique, la législation aurait pour rôle de mieux encadrer le marché des cryptomonnaies sur plusieurs points :
- Régulation harmonisée des entreprises proposant des crypto actifs à l’achat et à la vente (Exchanges comme Binance) sur le sol européen à travers l’attribution d’un statut (CASP). Ce statut est inspiré du modèle PSAN (Prestataire de services sur actifs numériques) imposé en France par l’AMF (Autorité des marchés financiers français). La France est donc la figure de proue de cette loi européenne et a donné l’idée à l’UE d’obliger ces plateformes à répondre à des exigences européennes afin d’obtenir le statut de prestataire européen. Concrètement, cette mesure obligera toutes les plateformes Exchanges a mettre en place la procédure KYC, c’est à dire que le clients seront obligés de fournir leur identité s’ils veulent acheter et vendre des crypto actifs. Cette obligation de statut CASP va être difficile à obtenir pour les entreprises voulant exercer sur le sol européen. Elles auront 18 mois pour se mettre en conformité, délai au delà duquel elles seront obligées de fermer leurs activités sur le sol européen en cas de non conformité.
- La mise en catégorie des cryptomonnaies :
- Les Stablecoins qui seront supervisés par l’ABE (Autorité bancaire européenne).De plus, les émetteurs de Stablecoins auront l’obligation d’assurer leurs fonds Stablecoins par des réserves de type 1/1, c’est à dire que pour 1 Stablecoin émis, il y aura 1 euro en réserve pour garantir la valeur du Stablecoin émise. Ces émetteurs devront avoir le statut de CASP et faire partie de l’UE.
- Les Tokens d’autres cryptomonnaies qui seront supervisés par l’ABE (Autorité bancaire européenne)
- Les Utility tokens ou cryptomonnaies utiles qui seront liés à une plateforme Exchange par exemple et donc rattachés aux CASP.
- A noter qu’il n’existe pas encore de régulation pour les NFTs, même au sein de la loi MiCA, pour le moment. Mais la Commission européenne est chargée de se pencher sur la question des NFTs dans un délai maximum de 18 mois.
- Au niveau énergétique, la loi MiCA va obliger les plus gros fournisseurs de services crypto à transmettre les informations sur leurs émissions carbone. De même pour les sociétés de minage qui devront justifier la provenance de leur électricité. Sur le sol européen, les autorités financières auront ainsi une carte fiable de l’origine renouvelable ou non de l’énergie permettant de faire tourner les fermes de minage de Bitcoin.
- Au niveau moral et juridique, l’objectif de cette loi serait de protéger les investisseurs des arnaques, projets bidons et piratages.
- Au niveau de la recherche technologique, la loi MiCA aurait pour objectif de promouvoir l’innovation du Web 3.0 et de la Blockchain.
La loi MiCA a donc été votée en large majorité par les députés européens et entrera en vigueur fin 2024 car il a été donné un délai de 18 mois pour que tous les acteurs de l’écosystème crypto puissent se mettre en conformité.
Ci dessous, les 380 pages de la loi MiCA en Anglais pour ceux qui ont le courage de la lire :
https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-13198-2022-INIT/en/pdf
La loi Transfer of Funds Regulation (TFR) dite Travel Rule
La loi MiCA n’est pas la seule mesure prise par les autorités financières à l’encontre des cryptomonnaies. Et si la loi MiCA se veut dans un objectif “bienveillant” vis à vis des cryptomonnaies, l’innovation des technologies Blockchain et la protection des investisseurs, on peut émettre de gros doutes sur la loi Travel Rule.
En effet, l’objectif de cette loi est tout simplement de tracer TOUTES les transactions en cryptomonnaies émises par TOUTES les plateformes Exchanges opérant sur le territoire européen. Par exemple, si vous transférez 1 euro en Bitcoin d’une plateforme Exchange comme Binance vers une autre plateforme Exchange, alors la Travel Rule contraindra Binance à fournir toutes les informations de la transaction aux autorités financières européennes (identité de l’auteur de la transaction, identité du récepteur, montant de la transaction, etc…)
Bien évidemment, il n’existe pas seulement de transactions de plateformes Exchanges à Exchange dans le milieu des cryptoactifs, vous avez également :
- Les transactions à partir ou vers un wallet numérique décentralisé comme Metamask par exemple.
- Les transactions à partir ou vers une clé physique Ledger ou Trezor considérés comme des cold wallets.
Et bien sachez que la Travel Rule s’appliquera également pour les transactions d’une plateforme Exchange vers un portefeuille Metamask ou une clé physique et inversement mais seulement à partir de 1000 euros.
Cependant, le point positif reste le fait que la Travel Rule ne prend pas en compte les transactions entre portefeuilles décentralisés et cold wallets, seulement à partir ou vers les plateformes Exchanges de type Binance et compagnie.
De plus, la Travel Rule donnera le pouvoir aux plateformes Exchanges de bloquer un retrait vers une autre plateforme Exchange ou un cold wallet si elle considère que la sécurité de la transaction n’est pas respectée… Autant dire que la boîte de Pandore est largement ouverte est que la politique du RGPD peut être très différente d’une plateforme à l’autre.
La loi TRF a été validée en même temps que la loi MiCA et entrera en vigueur fin 2024.
Ci dessous, le loi TRF en Anglais :
Cliquer pour accéder à Updated-Guidance-VA-VASP.pdf
Conclusion :
L’Union Européenne est donc la première entité à encadrer par la loi les cryptomonnaies.
La loi MiCA est plutôt positive puisqu’elle vise à protéger les utilisateurs et les investisseurs de toutes les démarches criminelles.
Malheureusement, en contrepartie, la loi TRF va forcer les entreprises cryptos et les citoyens à dévoiler leurs informations financières par le biais des plateformes Exchanges (CASP) et même via leurs colds wallets à partir de transactions supérieures à 1000 euros. A noter que la loi TRF s’applique également aux marchés boursiers traditionnels. Pas de jaloux donc.
Dans l’ensemble, cette régulation reste positive malgré les données numériques à portée des pouvoirs centralisés puisqu’elle donne une légitimité extrêmement puissante au secteur des cryptomonnaies dans un monde ou la Chine a interdit les cryptomonnaies et ou les Etats Unis viennent de déclarer la guerre à l’écosystème crypto.
Le seul point qui peut être très pénalisant au début pour l’Union Européenne est la possibilité que le statut de CASP soit inatteignable pour l’ensemble des plateformes Exchanges voulant exercer leurs activités en Europe. Dans ce cas, l’effet sera inverse, l’écosystème crypto fuira massivement l’Europe durant un temps. Dans ce cas, la solution sera :
- Soit que de nouvelles entreprises plus conformes émergent.
- Soit que les entreprises en fuite reviennent avec un dossier béton afin de prétendre au statut de CASP.
L’Union Européenne a donc, pour la première fois, une longueur d’avance sur un secteur extrêmement innovant de par une seule technologie: la blockchain. La légalisation des cryptomonnaies est donc proche et les entreprises cryptos pourront, à condition d’être en conformité à cette nouvelle loi, se développer en toute sécurité, à la fois pour elles mais aussi pour leurs utilisateurs/clients/investisseurs.
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