Pour ce premier trimestre de 2023, les banques européennes comme BNP Paribas, Crédit Agricole ou encore HSBC sont dans le vert avec une belle performance selon leurs propres rapports financiers.
Le Crédit Agricole a fait 1,872 milliards d’euros de résultat net pour ce premier trimestre de 2023. Source: https://www.credit-agricole.com
BNP Paribas a fait 2,845 milliards d’euros de résultat net pour ce premier trimestre de 2023. Source: https://invest.bnpparibas
Enfin, HSBC a fait 9 milliards de dollars de résultats nets pour la même période. Source: https://www.hsbc.com
La majorité des banques européennes affichent une forte croissance de leurs revenus nets, ce qui est d’autant plus surprenant, en contraste avec la déroute bancaire qui a lieu en ce moment aux Etats Unis.
Les raisons de cette croissance fulgurante en 2023
C’est la hausse des taux directeurs qui permet, paradoxalement, aux banques européennes d’accroitre leurs rendements.
Car si aux Etats Unis, c’est précisément ce qui a mis le feu aux poudres et fait exploser plusieurs banques régionales en complément de la cause des obligations long terme, il semblerait que les banques européennes soient moins exposées aux obligations long terme et soient plus sécurisées au niveau de leur ratio de liquidité, notamment grâce à la loi Bale 3 surgit des cendres de la crise de 2008. Source: https://abc-economie.banque-france.fr
Par exemple, pour le Crédit Agricole, ce sont ses revenus affiliés aux activités FICC, liées aux crédits et aux produits dérivés qui ont bondi de 41,8%.
En clair, la banque s’est gavée sur le dos du marché du crédit ainsi que sur le dos des cours du marché (matiéres premières, pétrole, etc…), c’est à dire le trading. Le Crédit Agricole, grâce à l’augmentation des taux directeurs, a augmenté ses marges tout en pariant justement sur les futurs prix des matiéres premières en pleine guerre Russie Ukraine. Source: https://www.capital.fr et https://www.lesechos.fr
Un phénomène généralisé en Europe puisque toutes les plus grosses banques on généré des revenus bien supérieurs à ce que les analystes avaient prévus.
Cependant, ces bénéfices liés à la hausse des taux directeurs n’est valable que sur le moyen terme.
Attention au revers de la médaille
Si sur le moyen terme, la hausse des taux directeurs des banques centrales peut être bénéfique pour les rendements des banques, cela peut représenter un véritable danger sur le long terme si cette hausse des taux s’inscrit dans la durée, comme c’est désormais le cas en 2023 dans le cadre de la lutte contre l’inflation.
La hausse des taux, par définition, est une augmentation des intérêts des crédits pour les emprunteurs. Dans une période d’inflation, avec un pouvoir d’achat en baisse, plus un crédit est cher et plus les mensualités de remboursement sont élevées. Ce qui augmente le risque de défaut de paiement pour les emprunteurs et donc par ricochet pour les banques, qui se verraient privées des remboursements de leurs prêts.
Sur le long terme, la hausse des taux directeurs qui était bénéfique pour les banques au début peut donc devenir leur pire cauchemar surtout lorsque les taux fonctionnent à variabilité.
En France, en Allemagne et aux Pays Bas, les crédits sont généralement à taux fixes, le risque de défaut de paiement est donc amoindri pour les emprunteurs qui ne subissent pas une hausse de leurs mensualités en cas de hausse des taux directeurs. Cependant les risques persistent avec la hausse de l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat des ménages qui ont de plus en plus de mal à boucler les fins de mois et donc à rembourser leurs crédits. Source: https://www.economiematin.fr
Par contre pour le reste de l’Union Européenne, notamment l’Italie, l’Espagne ou encore le Portugal, les crédits sont majoritairement à taux variables. Ce qui en période de hausse des taux directeurs est extrêmement dangereux pour les emprunteurs et les banques puisque les intérêts augmentent au fur et à mesure de la hausse des taux. Et lorsque l’on sait que les taux ont été relevé au moins 6 fois en zone euro depuis 2022, cela donne le ton sur la hausse des mensualités des ménages sur leurs crédits à taux variables. Source: https://www.revue-banque.fr
Sur le long terme, cette hausse des taux, si elle persiste, sera donc une catastrophe pour les banques européennes ayant forcément des activités au sein de ces pays ou les emprunts à taux variables sont courant. Source: https://www.lemonde.fr
Un système bancaire européen qui reste vulnérable selon le FMI
C’est le Fond Monétaire International lui même qui appelle à la plus grande prudence malgré les chiffres très positifs des résultats des banques européennes en ce début d’année 2023. Source: https://www.latribune.fr
Car selon Pierre-Olivier Gourinchas, le chef économiste du Fond Monétaire International, les banques européennes souffrent de 2 problèmes :
- Le manque d’union bancaire à l’échelle de l’Union Européenne.
- Des pays européens surendettés qui ne pourront pas aider les banques en cas de crise puisque les dépôts ne sont assurés que par les Etats sur leur propre territoire et non à l’échelle de l’Union Européenne.
Les pays étant déjà très endettés, cela signifie par exemple que la France sera incapable d’assurer les dépôts de tous les citoyens en cas de faillite bancaire systémique, contrairement aux Etats Unis qui sont prêt à injecter des trillions de dollars sur le marché pour stabiliser le système.
En résumé, selon Pierre-Olivier Gourinchas, les banques européennes sont plus solides que celles américaines mais possèdent moins d’outils en cas de difficultés.
Conclusion :
Les banques européennes ne subissent pour l’instant pas les mêmes problèmes que les banques américaines :
- Car elles sont moins exposées aux obligations long terme, gère mieux la stratégie de leurs portefeuilles d’obligations et ne subissent que les effets positifs moyen terme de la hausse des taux directeur.
- Ont un meilleur ratio de garantie de liquidité sur leurs dépôts.
- Sont réglementées par la loi Bale 3 d’après crise financière de 2008.
Cependant, si ce problème de hausse des taux favorise les banques pour le moment, il est évident qu’il ne faut pas que cette situation persiste :
- Car contrairement aux américains, il n’y a pas de réelle union bancaire en Europe ce qui, en cas de crises, rendra les banques moins solidaires et donc moins efficaces pour trouver des solutions.
- Sur le long terme, la hausse des taux directeurs conduira à une hausse des risques de défaut de paiement sur les crédits.
- Les pays de l’UE n’ont pas les reins assez solides économiquement, en raison de leurs dettes, pour supporter une crise bancaire comme celle que connaît actuellement les Etats Unis.
- L’UE compte prés de 5000 banques comme les Etats Unis sauf que l’économie des Etats Unis est bien plus plus imposante que l’ensemble de l’UE comme le suggère les dettes (15 000 milliards d’euros pour l’UE et 30 000 milliards de dollars pour les Etats Unis pour un ratio dette/%PIB quasi identique). Source: https://www.agefi.fr
En résumé, les banques européennes sont plus solides sur le moyen terme à la hausse des taux mais plus fragiles sur le long terme à cause des crédits à taux variables courant dans certains pays de l’UE. Nos banques sont plus résilientes mais en cas de crises, le système sombrera beaucoup plus rapidement que le système Outre Atlantique.
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