Comment la crise bancaire actuelle montre la fragilité des banques centrales !?

La faillite de 3 banques en une semaine à mis le feu au poudre sur les marchés financiers. Les actions bancaires à l’échelle mondiale sont en chute libre. Jusqu’à -75% pour les actions bancaires de la First Republic Bank aux Etats Unis et jusqu’à -30% pour les actions du Crédit Suisse en Europe.



Rappel des causes de la chute de la Silicon Valley Bank

La première cause de la chute de la SVB est la hausse des taux directeurs des banques centrales et surtout celle de la Réserve fédérale américaine.

Car avant tout, il faut savoir que les banques ont l’habitude d’acheter des titres adossés à des créances hypothécaires et des bons du Trésor aux Etats Unis.

Les titres adossés à des créances hypothécaires sont des obligations constituées de prêts immobiliers achetés aux banques. Source: https://www.investirsorcier.com. La banque devient, par ce biais, un intermédiaire entre l’acheteur immobilier et la finance d’investissement. La banque peut dés lors revendre ce prêt hypothécaire et récupère avant même le remboursement du prêt par l’acheteur immobilier un montant global du prêt mais décoté par rapport à la valeur du prêt initial. De plus, cela permet de sécuriser la banque puisque si l’acheteur fait un défaut de paiement, la banque ne sera pas en danger.

Les bons du Trésor sont des titres d’emprunt émis par les Etats. Si vous achetez un bon du Trésor vous devenez donc créancier de l’Etat qui doit vous rembourser à titre mensuel comme n’importe quel crédit. L’Etat a donc une dette envers vous.

Or, ce sont précisément ce genre de pratiques qui ont provoqué, en partie, la chute de la Silicon Valley Bank, puisque celle ci a acheté des titres adossés à des créances hypothécaires ainsi que des bons du Trésor américain avant la hausse des taux directeurs de la Réserve Fédérale Américaine. Ces titres ont donc vu leurs prix baisser au fur et à mesure que les taux d’emprunts ont augmenté, car les nouvelles obligations étant plus avantageuses pour les investisseurs, les anciennes obligations sont vendues en vitesse ou délaissées et leurs prix baissent par la mécanique de l’offre et de la demande sur les marchés. Source: https://www.amf-france.org

Avec la hausse massive des taux directeurs, les banques se retrouvent en 2023 avec des titres et des obligations dont les prix ont baissé et qui engendrent des pertes non enregistrées car ce sont des titres non vendus et non imputables au résultat net pour le moment, sauf exception.

Et c’est précisément cette exception qui concerne la Silicon Valley bank. Comme décrit plutôt, les banques dont les titres ont baissé sont censées attendre que les taux directeurs baissent et que les prix remontent de nouveau pour vendre leurs titres. Cependant, en cas de difficultés, il arrive qu’une banque soit contrainte, par le Trésor américain, de vendre ses titres malgré les pertes que cela engendrerait.

C’est exactement ce qui s’est passé pour la SVB.

Car, la deuxième cause de la chute de la SVB est la fuite des dépôts de la part de ses clients, obligeant la banque à trouver des liquidités par tous les moyens. Elle n’a eu d’autres choix que de vendre ses titres à pertes au point qu’au premier trimestre de 2023, elle s’est retrouvée avec 1,8 milliards de dollars de pertes après impôts. Source: https://www.morningstar.fr

Cette fuite massive des clients est en lien avec le secteur des technologies qui subit les multiples crises depuis 2022. Source: https://www.lesechos.fr

Mis à mal par la hausse des taux directeurs et par la baisse des dépôts de ses clients, la SVB a annoncé ce bilan catastrophique du premier trimestre 2023 qui a enfoncé le clou et provoqué la panique chez les clients et investisseurs de la SVB.

A cela s’ajoute une mauvaise gestion des risques comme le montre le tableau ci dessous :


Les réactions des banques centrales pour limiter la casse

La Réserve Fédérale Américaine : BBBBBBRRRRRRRRR (bruit de la planche à billet en train d’imprimer de l’argent en masse)

Aux Etats Unis, suite au crash de la Silicon Valley Bank, la Réserve Fédérale Américaine a injecté 300 milliards de dollars pour rassurer les marchés en seulement une semaine.

Source: Lark Davis Twitter

Pour comprendre ce que cela signifie, il faut savoir que la FED gère, comme n’importe quelle banque un portefeuille d’actifs allant de :

  • Bons du Trésor court terme.
  • Bons du Trésor court terme.
  • Certificats d’or.
  • MBS (titres adossés à des créances hypothécaires)
  • Autres comme les titres d’agences fédérales ou des créances d’autres banques centrales
  • Et enfin les prêts accordés au marché financier

Ce portefeuille d’actifs est estimé à environ 4000 milliards de dollars et il consiste pour la FED à essayer de dégager un rendement positif par une voie interventionniste (équivalent à du trading pour vulgariser avec des opérations de vente et d’achat).

Mais aussi un portefeuille passif :

  • Billets en circulation
  • Fonds propres
  • Obligations envers le Trésor US
  • Obligations envers les banques

De même pour le portefeuille passif, il avoisine les 4000 milliards de dollars. La gestion passive consiste à ne pas intervenir sur ce portefeuille (pour vulgariser le process)

Source: https://www.cairn.info et https://www.manulifeim.com

Au total, le bilan de la Réserve Fédérale avoisine les 8000 milliards de dollars (8639 milliards pour être précis au moment ou j’écris ces lignes)


Comme le montre le bilan ci dessus de la FED, il a littéralement explosé depuis la crise de 2008 et celle du coronavirus en 2020.

Cela signifie qu’à chaque crise la FED crée de l’argent pour le prêter aux marchés financiers afin de les aider à supporter la crise. Et comme on le constate sur le graphique, à chaque crise majeure, la FED a littéralement doublé son bilan total.

L’impression d’argent est devenue une habitude comme le montre la récente injection de 300 milliards de dollars après la chute des 3 banques aux Etats Unis. Source: https://www.zonebourse.com

La Banque Centrale Européenne : augmentation des taux directeurs de 50 points.

Source: https://www.ecb.europa.eu

D’après son communiqué du 16 mars 2023, la BCE a décidé de remonter pour la 6 éme fois consécutive ses taux directeurs.

Ses 3 taux seront désormais entre 3 et 3,75%. Cette hausse, explique la BCE, suit la logique de lutte contre l’inflation qui subi une nouvelle vague de hausse, notamment en France avec les prix de l’alimentaire qui s’envolent dans ce deuxième trimestre rouge.

Source: https://www.latribune.fr/economie

La banque centrale Suisse : 50 milliards de prêt au Crédit Suisse

Le Crédit Suisse étant en grande difficulté autant sur ses actions bancaires que sur son bilan de 2022 a été aidé par un prêt de 50 milliards de la part de la banque centrale de Suisse qui est elle même… En bilan négatif avec une perte sur 2022 de 133 milliards d’euros.

Source: https://www.capital.fr

Des réactions qui en disent long sur la fragilité de nos banques centrales et de nos monnaies fiats

Concernant les banques centrales Suisses et américaines, l’évidence est criante. Pour sortir leurs banques de la crise, elles ont décidé d’imprimer plus d’argent.

Ce qui revient au problème de l’impression illimitée d’argent qui n’est pas sans conséquence. On le voit bien dans les pays qui sont déjà en crise comme le Liban, le Venezuela, le Nigeria et même l’Argentine.

Le dénominateur commun de ces pays est la chute de la valeur de leurs monnaies officielles par rapport au dollar causées par une chute de leur PIB et donc de leur activité économique mais aussi par des dettes publiques abyssales dont les gouvernements et banques centrales ont essayé d’éponger par… l’impression massive d’argent.

Résultat. Dans chacun de ces pays, la monnaie officielle perd régulièrement de la valeur.

Source: https://fr.euronews.com et https://investir.lesechos.fr et https://www.zonebourse.com

Le risque désormais pour nos banques centrales qui impriment en masse de l’argent pour financer les marchés boursiers est de provoquer la chute des monnaies comme l’euro ou le dollar dans un contexte géopolitique et économique déjà tendu par la guerre Russie Ukraine et la crise énergétique.

Il est à noter que la politique engagée en 2022 de réduction sévère du bilan de la FED visait à diminuer les liquidités octroyées par la banque centrale afin de faire réduire la circulation des capitaux dans l’économie et donc de lutter contre l’inflation par la même occasion de façon indirecte. Mais avec les 300 milliards de dollars prêtés lors de la chute des 3 banques la semaine dernière, la FED a effacé en une semaine 50% de la réduction de son bilan sur une année. Autrement dit l’inflation ne pèse pas lourd face à la sécurité du système bancaire. Source: https://www.agefi.fr

De même pour la hausse des taux directeurs. Nous avons vu précédemment que c’était précisément cette hausse des taux qui avait provoqué en partie et en premier lieu la chute de la Silicon Valley Bank en provoquant des pertes sur ses obligations long terme. En sachant que toutes les banques ont des expositions sur les obligations long terme, plus les taux directeurs augmentent et plus la marge de manœuvre des banques est étroite concernant leurs obligations long terme.

Or, que font les banques centrales ? Elles continuent d’augmenter ces mêmes taux en prétextant que les banques européennes sont saines et hors de danger. Source: https://www.lefigaro.fr

Et le Crédit Suisse alors?

Conclusion :

Les banques centrales occidentales ont totalement dérivé de leur rôle initial qui était d’assurer la bonne circulation de l’économie sur le court terme. Or, aujourd’hui, elles se basent toutes sur le long terme avec des budgets défiant de plus en plus les lois de la gravité économique.

Dans un même temps, ces mêmes banques sont prises en étau par l’inflation qu’elles essayent de combattre grâce aux augmentations des taux d’intérêts qui font désormais plus de dégâts au niveau des banques que l’inflation elle même.

Si les banques centrales continuent dans cette voie, la chute risque donc d’être brutale pour les monnaies occidentales comme l’euro ou le dollar.

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par Anders Noren.

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